Le groupe des neuf Sénateurs, qui s’était opposé à la ratification de la politique générale du Premier ministre Laurent Lamothe, a exhorté mardi le Président Michel Martelly à abandonner l’idée de promulguer la version amendée de la constitution présentée par les parlementaires comme une épée de Damoclès pour la nation et la démocratie.
Dénonçant des pressions internationales exercées sur les autorités afin d’obtenir à des fins inavouées la validation d’un texte devenu très controversé en raison des « manipulations frauduleuses » qu’il avait subies, des membres de la minorité au Grand Corps ont estimé que toute attitude irresponsable du chef de l’Etat dans ce dossier aggraverait un climat politique déjà difficile.
Après plusieurs rendez-vous manqués, Michel Martelly avait promis le week-end écoulé de promulguer incessamment la version corrigée de l’amendement de la loi mère soumise à une révision minutieuse par les bureaux des deux Chambres du Parlement et des représentants de la société civile.
« De grâce M. le Président, ne publiez pas cet amendement constitutionnel. Car, si vous avez un amendement entre vos mains, c’est un faux », a lâché le premier Sénateur de l’Artibonite (nord) François Anick Joseph. L’élu de l’Organisation du peuple en lutte (OPL) a aussi rappelé qu’à son accession au pouvoir, il y a un an, l’ancien chanteur avait du rapporter pour cause de dénaturation la constitution amendée que venait de promulguer son prédécesseur René Préval, le 13 mai 2011, 24 heures avant de quitter le pouvoir. S’interrogeant sur l’origine du texte que le chef de l’Exécutif s’apprêterait à envoyer au journal officiel Le Moniteur, M. Joseph l’invite à ne point céder aux pressions de la communauté internationale.
« C’est ne pas le moment de chercher à légaliser ce qui est anormal », a de son côté affirmé son collègue du même parti, Francisco de la Cruz en préconisant qu’un nouveau projet d’amendement constitutionnel soit introduit le moment venu en conformité avec la procédure prévue en la matière. Lors de la dernière session ordinaire de la 49e législature, le Sénat et la Chambre des Députés auront l’opportunité de proposer dans les mêmes termes des modifications de la charte fondamentale que la 50e pourra entériner ou non, a-t-il indiqué.
Un troisième élu de l’OPL, Andrys Riché, conseille au Président de la république de maintenir la position de sagesse qui est la sienne jusqu’à présent sur cette épineuse question de l’amendement. Pour lui, toute tentative de promulgation d’une nouvelle constitution falsifiée à la base et rejetée par de nombreux secteurs de la vie nationale débouchera sur une crise majeure.
Egalement membre du groupe des neuf, le Sénateur Francky Exius, issu de l’ancienne plateforme présidentielle Inite à l’origine du processus bâclé de révision constitutionnelle, a, pour sa part, recommandé qu’un nouveau Conseil électoral provisoire soit mis en place à partir d’un consensus politique en vue de l’organisation des prochaines élections sénatoriales, municipales et locales. Point de vue que partage le Sénateur Riché, farouchement opposé à la formation d’un CEP permanent selon la formule prévue dans la loi constitutionnelle amendée (les représentants des trois pouvoirs) totalement différente de celle de la charte fondamentale de 1987 (les collectivités territoriales), véritable expression de la démocratie participative.
Pierre d’achoppement depuis quelque temps entre la Présidence et une composante importante du Parlement, la promulgation éventuelle de la nouvelle constitution divise également la classe politique et la société civile.
spp/Radio Kiskeya